L’épopée de Lars & Aatos

Chapitre 31

15 juin 2142

Le plateau de l’Alta ressemblait à une steppe. Quelques renoncules des glaciers poussaient, çà et là, entre les mousses et le lichen. Un paysage vert et jaune terne s’offrait à eux à plus de quatre mille mètres d’altitude. Au loin, ils apercevaient maintenant le volcan El Rugido : point culminant de la presqu’ile. Derrière eux, le cratère n’était plus visible. Seule la partie des stalagmites géantes se trouvait encore dans leur champ de vision. Le petit groupe avait établi le campement en bordure du plateau de l’Alta, au sommet des montagnes Pâles – protection naturelle du cratère éteint de la presqu’ile. Depuis le plateau de l’Alta, la mer Tyrrhénienne se déployait à perte de vue.

— Faisons … Faisons une pause là.

Lars était si épuisé à cause de la confrontation avec l’entité des vents qu’ils ne purent aller plus loin. Un gros rocher avait fait office de mur contre lequel Aatos installa leur toile de tente.

— Il n’y aura plus de changement de météo à présent… Serre un peu le haut-là, pas que ça s’envole.

L’idée de cet abri de fortune était plutôt de conserver la chaleur corporelle que se protéger des intempéries. Le mois de juin offrait un soleil généreux la journée, en temps normal. Aatos s’assit auprès de son oncle, après avoir resserré l’attache de la toile de tente.

— Comment allons-nous annoncer la mort de Quan et Rocky ?

— Nous ne le ferons pas, ils le savent déjà …

Les oiseaux volaient à nouveau dans le ciel.

— Tu … Tu peux me sortir trois Spheros grasses de mon sac s’il te plaît, j’ai besoin de récupérer.

Aatos ouvrit le sac de l’oncle et sortit des Spheros ainsi que de l’eau. Il tendit le tout à son oncle.

— Merci Aatos.

— Dis-moi Lars, c’était quoi cette créature ? Pourquoi elle voulait nous tuer ?

L’oncle mordit dans une des boules cuites au royaume des oiseaux. Tout en mâchant, il répondit.

— Cette créature est …Scrunch … le résultat d’une mauvaise utilisation de ça.

Lars montrait son bracelet de vie. Sa peau burinée par la vieillesse captait les rayons du soleil de l’après-midi. La bouche pourtant pleine, il mordit dans une autre Spheros. Des miettes se collaient dans sa barbe grise ébouriffée.

— C’est-à-dire ?

— Eh bien, les concepteurs de ce truc … Scrotch … n’ont jamais mis de limites d’utilisations aux bracelets. Certains ont trop utilisé leurs pouvoirs et ont fini par y ressembler …Scrunch …

— Comment ça ?

— Apparemment, ce sont les gènes qui mutent … Scrotch … Et c’est vicieux, car plus tu utilises tes pouvoirs, plus … Scrunch … Tu as besoin de les utiliser. Et c’est à ce moment-là que ça devient la M*****.

— Mais pourquoi nous, ça nous fait rien ?

— Ça nous le fait … Scrunch … Mais, nous utilisons plusieurs gemmes en alternance … Slurp … Et cela permet de conserver un équilibre. C’est comme ça que j’évite de devenir dépendant de ces pouvoirs.

— Et donc, cette créature est en fait, un humain qui aurait muté ?

— Ouais, c’est ça … Scrunch … Il a utilisé cette gemme-là trop de fois.

Lars sortit de sa poche l’hambergite.

— Et ensuite, ça attaque ton cerveau et tu deviens vraiment c** … Scrunch …  Je ne peux pas t’assurer à cent pour cent la raison de son attaque, mais je pense que c’était plus une histoire de perte de contrôle qu’autre chose … Scrotch … Nous tuer lui donnait juste une dose supplémentaire … Scrotch … Et la raison de sa venue jusqu’ici : même M*****, c’est une question de shoot extrême … Scrunch … Les vents d’altitudes sont certainement plus violents : parfait pour un junkie du vent.

Lars enfila le reste de la troisième Sphero dans la bouche. Il tendait toujours sa main gauche à son neveu.

— Tiens, elle pour toi.

L’hamberite reflétait les rayons du soleil.

— Non, non, c’est toi qui l’as battu, c’est toi qui mérites de la garder.

— Aatos, ce n’est pas une question de mérite. B*****, on est une équipe et, en plus, j’ai atteint mon seuil de tolérance maximum avec Pluma. Prends-là, c’est un ordre.

Le neveu se saisit de la pierre. Une lueur blanche, comme un éblouissement, sortit de la lunette du bracelet. La pierre avait passé à travers la glace et s’était déposée au bon endroit.

— C’est très bien. T’es un chouette petit gars, toi ! Je vais aller me coucher maintenant. Tu surveilles les affaires jusqu’à la tombée de la nuit et tu me rejoins ensuite, d’accord ?

— Entendu ! Viens Wali, on va chercher du bois pour faire le feu !

Le petit animal monta sur l’épaule de son compagnon.

T’es un chouette petit gars …

À la tombée de la nuit, une lueur rouge monta dans le ciel. Aatos avait attendu que Wali dorme pour soigner son poignet avec Amor…

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